Au-delà des résultats en grande pompe de la sélection nationale ces dernières années, un autre rayon de soleil est arrivé dans le microcosme du football luxembourgeois : un stade de Luxembourg bouillant, qui détonne dans un pays généralement plus sur la retenue quand il s’agit d’exprimer sa passion.
C’est un sacré contraste. Passer des matchs de BGL Ligue, avec des affluences particulièrement modestes et une ambiance dans l’ensemble assez amorphe – pour ne pas être plus sévère – à des milliers de supporters bouillants au moment de soutenir les Roud Léiwen, fait toujours un sacré choc. Le sentiment dominant est d’ailleurs généralement le même : l’impression de ne plus être dans le même pays ni le même monde.
Superbe enceinte + résultats en hausse = affluence en vogue
Comment expliquer un tel engouement, une telle folie ? Avant tout, évidemment, par les résultats. Depuis l’inauguration de l’enceinte face à l’Azerbaïdjan, les Roud Léiwen ont disputé quatorze rencontres à domicile. Le bilan ? Sept succès, un match nul et six défaites. Un résultat dans l’ensemble très positif, qui plus est au vu de l’historique généralement moins flatteur de la sélection lors des décennies précédentes. Si l’élévation du niveau des hommes de Luc Holtz justifie logiquement des résultats en nette progression, on ne peut occulter l’importance de ce douzième homme, capable d’offrir un surplus de courage et de motivation aux acteurs sur la pelouse. Et, sans surprise, ce soutien populaire est une immense satisfaction du côté de la fédération, qui a longtemps attendu cette nouvelle enceinte. « Nous sommes extrêmement contents », confirme ainsi Marc Diederich, responsable presse et juriste au sein de la FLF. « La croissance des spectateurs dépasse nos attentes. On a été surpris par cet engouement. On s’attendait à voir plus de monde dans le stade, car cette équipe joue bien, mais à ce point, c’est tout simplement formidable. »
Après beaucoup d’années de trop du côté du vétuste Josy Barthel, la sélection et tout son entourage ont en effet pu savourer ce changement de cadre pour se confronter aux autres nations mondiales. Et si les qualités du stade de Luxembourg sont évidemment à noter, Diederich ne se leurre pas sur l’importance des performances des Roud Léiwen dans ces affluences toujours grandissantes. « Il ne fait pas de doute que ce bâtiment extrêmement moderne, couvert, avec du catering, n’a plus rien à voir avec Josy Barthel. Mais c’est sûr que le fait qu’il y ait un grand enjeu, que l’on soit toujours en course pour se qualifier, cela joue énormément dans les affluences. Si on était derniers avec un point, je ne pense pas qu’on verrait autant de monde à chaque match… » Un rappel que, comme toujours, au-delà des structures mises en place, la réalité du terrain joue toujours un rôle décisif. Mais la vulnérabilité du sélectionneur, qui à plusieurs reprises en conférence de presse a rappelé sa forte émotion au moment de vivre ces 90 minutes portées par un public déchaîné au sein d’un pays généralement bien plus sur la réserve, confirme bien l’importance de ce douzième homme.
Autre source de satisfaction ? La vente de produits dérivés, à l’image de cette boutique ouverte les soirs de match qui, à chaque fois, trouve preneurs. « Les ventes de maillots depuis le début de la campagne fonctionnent extrêmement bien. On vend des maillots, des écharpes, cela tourne énormément. On est extrêmement satisfaits des résultats », confirme ainsi le responsable presse de la FLF.
Un soutien notable à l’extérieur
Au-delà d’affluences toujours plus élevées à domicile, on retrouve toujours quelques vrais irréductibles qui font les longs déplacements à l’extérieur pour soutenir les leurs. Si l’exemple du match au Portugal n’est pas forcément celui à prendre, la proximité entre les deux nations expliquant beaucoup dans la forte présence de supporters luxembourgeois, on en trouve toujours néanmoins en Slovaquie, en Bosnie ou ailleurs, pour donner de la voix et assister à des joutes toujours plus disputées.
Si l’on ne peut évidemment pas se comparer à certaines autres nations célèbres pour leurs déplacements épiques comme l’Irlande, l’Écosse, ou d’autres véritables malades de football, cela demeure néanmoins un fort beau signe de constater, à chaque rencontre en terrain hostile, une présence – certes minime, mais toujours porteuse – de voix bien décidées à s’égosiller jusqu’au bout du match pour offrir un soutien toujours apprécié pour les joueurs.
Un stade bientôt trop limité en capacité ?
Tous ces voyants positifs pourraient-ils vite devenir un problème ? C’est une question légitime, qui pourrait potentiellement être source d’interrogations sur le futur de l’enceinte. Car en ayant décidé d’une capacité maximale de 9 385 personnes (15 000 en cas de concerts), et au vu de plusieurs guichets fermés depuis le 1er septembre 2021, l’affluence pourrait vite devenir inférieure à une demande sans cesse grandissante. Un problème de riches, certes, mais un problème néanmoins, qui paraît difficilement soluble, en particulier sur le plan des subventions qui risquent de devoir attendre de longues années avant de potentiellement être accordées de nouveau à la Fédération luxembourgeoise de football. Une donnée qui, si elle est présente dans les pensées de la FLF, n’assombrit pas un ciel jusqu’à présent fort bleu. « C’est sûr que c’est une bonne question. Actuellement, c’est encore OK. Mais en effet, si la progression continue à ce rythme, on va vite se rendre compte que 2000 ou 5 000 sièges en plus seraient peut-être mieux. On n’en est pas encore là, et sincèrement, cela serait un bon problème à avoir. »
Quand bien même la situation ne s’est pas encore présentée, quelles seraient tout de même les possibilités de la sélection pour répondre à une demande supérieure à l’offre ? Une rénovation, tout simplement. Selon les plans de l’enceinte, il serait ainsi possible, si nécessaire, d’offrir une augmentation du nombre de places disponibles afin de satisfaire encore un peu plus un engouement qui, jusqu’à présent, ne voit pas de limites. « Le stade peut ajouter deux rangées de plus de chaque côté pour monter à 12 000 places. » Une augmentation proche de 25 % de la capacité maximale, donc, et qui serait à même d’offrir plus de marge à la fédération pour satisfaire un public grandissant et toujours plus avide de profiter de cette ambiance qui détonne avec le reste du pays.
S’il est toujours dangereux d’anticiper le futur, en particulier en imaginant une multitude de données positives, gageons tout de même qu’après des années bien plus mornes au sein d’un Josy Barthel décrépi, le simple fait de se poser ce genre de questions est un nouveau signe de la progression fulgurante, tant en termes de résultats que de popularité, des Roud Léiwen. « C’est sûr que si on réussit à se qualifier pour l’Euro 2024, la prochaine campagne pour les qualifications de Coupe du monde, on sera sûrement sold out dès le premier jour de ventes… », termine ainsi Marc Diederich. Un problème ? Sans aucun doute. Une situation que l’on rêve de vivre ? Encore plus.
Les 3 plus grandes affluences du stade de Luxembourg :
– Luxembourg – Turquie : 9375 personnes
– Luxembourg – Islande : 9374 personnes
– Luxembourg – Portugal : 9231 personnes
Les 3 plus petites affluences du stade de Luxembourg :
– Luxembourg – Hongrie : 3571 personnes
– Luxembourg – Malte : 4028 personnes
– Luxembourg – Irlande du Nord : 4540 personnes
La sono, seul véritable bémol du Stade de Luxembourg
Si on ne peut jamais reprocher au public de faire du bruit et d’encourager à tue-tête sa sélection durant l’équivalent de 90 minutes, permettons-nous tout de même d’offrir une légère critique. Une sono qui, décidément, continue rencontre après rencontre d’être mille fois trop forte. C’est une chose de se laisser porter par la musique et l’ambiance d’un stade de football, c’en est une autre de ne plus pouvoir discuter avec son voisin de gauche ou de droite sans lui crier dans les oreilles. Quelques décibels de moins et vraiment, nous n’aurons plus rien à reprocher à une enceinte qui, depuis ses débuts, est très proche d’être irréprochable.
Tendai Michot
