Pedro Resende : « On pouvait aller chercher le podium »

Après une formidable saison 2021/2022, Pedro Resende a été licencié par le club du FC Differdange, après un début de saison compliqué. L’entraîneur revient sur une décision qu’il juge hâtive, la fierté du travail accompli, et défend son bilan.

Comment avez-vous vécu ce limogeage de Differdange ? Avez-vous été surpris ?

Je dirais oui et non. Oui, car avant les matchs contre Hesperange et Dudelange, nous étions sur un enchaînement de quatre victoires et un match nul… Nous n’étions aussi qu’à quatre points de la troisième place, avec un calendrier plus que favorable devant nous. Maintenant, je n’étais pas si surpris car l’entraîneur qui a pris ma place (ndlr : Stéphane Léoni) était présent à toutes les rencontres depuis le début de saison. Je sais aussi qu’il a une très grande amitié avec le directeur sportif. À partir de là, ce n’était pas une surprise.

Je pensais vraiment que le très beau classement de l’an dernier me donnerait plus de crédibilité. Ce qui est marrant, c’est que notre système, c’est le même que celui du champion, le F91. Mais là, personne n’a de souci avec ça…

Est-ce que cela a mis une pression supplémentaire de sentir un potentiel remplaçant présent au jour le jour ?

Mon travail, c’était de faire le maximum pour remporter les matchs. Je ne pouvais pas me focaliser sur cela. Mais je vais être parfaitement clair : je suis arrivé à un moment où, quand j’ai compris que cela n’allait pas continuer, j’étais profondément certain que le club y perdait plus au change que moi. Je dis cela sans aucune arrogance. Faire la même chose que ce que l’on a fait l’an passé, cela va être très compliqué. Et mieux, cela sera impossible. Les résultats sont là. On a fini deuxième. En 44 matchs avec Differdange, on a marqué plus de cent buts, on a encaissé beaucoup moins que les années précédentes. J’estime que moi et mon staff avons montré nos capacités. On verra dans le futur si mon successeur peut faire mieux, mais cela me parait très difficile. La seule chose que je voudrais dire sur ce sujet, c’est que parler de mon système et d’un jeu soi-disant défensif, c’est assez « facile ». 

Il y a en effet eu quelques propos parlant d’un système trop défensif. Qu’en pensez-vous ?

Les critiques sur le système, j’ai du mal à les comprendre et les accepter. Qu’un supporter ne comprenne pas tout et se base simplement sur la feuille de match pour dire que c’est défensif, pourquoi pas. Mais pour des gens qui sont dans le football, ça, je ne peux pas comprendre. Un système c’est quelque chose, mais c’est bien la dynamique et les déplacements qui font la différence. Et avec cette manière de jouer, nous avons marqué plus de cent buts, et égalé le meilleur classement de l’histoire du club. Sachant que les fois précédentes où cette place de dauphin avait été atteinte, il n’y avait que trois ou quatre clubs qui aspiraient au podium. Aujourd’hui, il y en a sept ou huit. Je pensais vraiment que le très beau classement de l’an dernier me donnerait plus de crédibilité. Ce qui est marrant, c’est que notre système, c’est le même que celui du champion, le F91. Mais là, personne n’a de souci avec ça…

En début de saison, votre président ne cachait pas l’ambition de terminer champion dans une interview dans nos colonnes. Vous aviez tempéré ses propos. Est-ce que vous pensez qu’avec un tel décalage dans les objectifs, c’était possible de fonctionner ?

Quand le président a donné cette interview, je peux comprendre son état d’esprit. Après une si belle saison l’an passé, avec toutes ces choses qui avaient changé positivement, après le très bel affrontement en Conference League ou même durant les matchs amicaux, j’avais aussi dans un coin de la tête l’idée de me battre pour le titre. Mais pas au point de l’annoncer publiquement. Il faut quand même prendre en compte la différence de moyens qu’il y a avec Hesperange et Dudelange. Même le Racing ou Niederkorn ont bien plus de budgets. Je ne sous-estime pas les investissements que le président a effectué pour optimiser l’équipe et notre travail. Il l’a fait, vraiment. Mais jouer le titre, on pouvait y penser, mais le proclamer haut et fort dans les médias, c’était prématuré. Pour aller chercher la place de champion, il fallait que beaucoup de choses s’alignent. Quand on voit le début de saison qu’effectuent Hesperange et Dudelange, c’est quasiment mission impossible. Donc encore une fois, je comprends son envie d’aller chercher ce titre, et je comprends la frustration de voir l’écart avec les deux premiers, mais il y a énormément de facteurs à prendre en compte.

On sentait une vraie complicité entre le staff et les joueurs (…). Il n’y a jamais eu de clash. Jamais.

Sentiez-vous toujours le groupe derrière vous ? Vous n’avez pas eu un sentiment de cassure ?

Absolument pas. Avant les matchs contre Hesperange et Dudelange, encore une fois, on était sur quatre victoires et un nul dans lequel on avait raté quatre ou cinq occasions très franches. Après, on joue le Swift. On a les statistiques qui montrent bien qu’en termes d’opportunités, on était devant. Ils ont fait deux frappes pour deux buts. Nous, six pour un… Il nous a manqué la finition, mais dans le contenu, on a été excellent. Et j’ai vu tous mes joueurs qui continuaient de courir, à se battre, à s’arracher… Je les ai vu dans le vestiaire, après la rencontre, complètement cuits. Ce n’est pas l’état de joueurs qui ont lâché. Et c’était exactement la même chose contre Dudelange. On prend un troisième but dans les dernières minutes, et encore une fois, on aurait pu revenir au score. Quant à l’entraînement, cela se passait toujours bien. On sentait une vraie complicité entre le staff et les joueurs. Alors évidemment, certains qui ne jouent pas ne sont pas content, mais cela n’a jamais été un problème. Il n’y a jamais eu de clash. Donc je ne peux pas dire qu’il y ait eu un problème avec les joueurs. Jamais.

Vous pensez donc que vous étiez toujours capable d’aller chercher une qualification européenne pour l’an prochain ?

Absolument. Je ne peux pas vous dire que c’est certain que ça allait se faire, mais je sentais que le groupe était derrière moi, et que nous nous serions tous battus pour le faire. Nous attaquions une série de match plutôt favorable, même si pour leur premier match sans moi, Differdange n’a pas réussi à battre Kaerjeng. Quand je suis parti, il restait 63 points à distribuer. Nous avions quatre points de retard sur la troisième place. Evidemment qu’on pouvait aller la chercher. Il faut savoir affronter des périodes un peu plus compliquées. En dix ans, au moins huit entraîneurs sont passés par Differdange (ndlr : Stephane Léoni est le dixième entraîneur du FC Differdange depuis 2012). Donc à un moment, cela serait intéressant de se demander si c’est toujours la faute des joueurs ou entraîneurs, ou si le problème est plus dans la structure globale, et la manière de gérer. Ce serait une très bonne question à se poser.

Vous imaginez-vous reprendre un poste rapidement en BGL Ligue, ou est-ce l’occasion de faire un break ?

Cela dépend. Je suis quelqu’un qui vit de foot. C’est ma passion. Mon père était joueur et entraîneur, j’ai tout de suite baigné dedans, et j’ai toujours autant aimé ça. Maintenant, il va falloir un projet intéressant dans lequel tout colle pour partir dans un nouveau challenge.

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