La recherche de la perfection

À eux deux, ils capitalisent cinquante-huit points sur soixante. Des chiffres à faire tourner la tête, mais qui n’offre qu’un avantage de deux points pour l’un, et une seconde place pour l’autre. Pas de quoi ternir un bilan absolument faramineux pour Carlos Fangueiro et Pascal Carzaniga, adoubés par leur effectif.

Il y a certains signes qui ne trompent pas. Alors que les joueurs du Swift et du F91 reviennent sur leur début de saison et le clash à venir de ce week-end, tous, à un moment, mentionnent leur entraîneur comme facteur-clé des excellents résultats. Sans avoir été questionné sur le sujet, ils y viennent naturellement. La preuve que les techniciens sont adoubés par leur effectif, qui n’hésite pas à plus détailler l’apport du coach. « Fangueiro sait très bien gérer les états de fatigue, et l’aspect mental » annonce d’emblée Samir Hadji. « Il a fait tourner les bons joueurs aux bons moments, ce qui nous a permis de ne pas perdre le moindre point dans un début de saison entremêlé avec la campagne européenne »

L’exigence de tous les instants

Le deuxième meilleur buteur du championnat va d’ailleurs plus loin, en plaçant son technicien au même niveau qu’un certain Toppmöller. « Avec Dino, Fangueiro fait partie des meilleur coachs que j’ai eu dans ma vie. Ce sont des entraîneurs avec des principes de jeu, qui voient ce qu’on ne voit pas. Quand Becca a lâché le club, tous ceux qui ne jouaient pas sont restés. Et Carlos a su leur redonner la confiance, et faire de ce groupe une énorme équipe. Il en veut toujours plus, et c’est ce genre d’état d’esprit qu’il faut. Et le football pratiqué est très plaisant. Il veut nous voir prendre du risque, quitte à parfois se louper. Il y aura des erreurs de temps à autre, mais c’est une question de philosophie ». Une opinion que partage le capitaine Medhi Kirch, lui aussi dithyrambique sur les qualités de son coach, et qui n’oublie pas sa réaction lors de la cruelle élimination en Ligue des Champions. « Fangueiro, au fond, je pense qu’il a été très déçu en Europe. Mais ce qui est beau, c’est qu’il a pris la responsabilité sur lui. On n’est pas aveugle, on a tous vu que ce sont des erreurs individuelles qui nous ont plombé contre Pyunik. Mais jamais il n’a pointé qui que ce soit du doigt. Il a pris la défaite sur lui, et ça, c’est magnifique. Il nous protège toujours. Mais cela ne l’empêche pas d’en demander énormément. J’irais même jusqu’à dire qu’il fait de nous des joueurs encore meilleurs  que ce que nous sommes vraiment.»

Une exigence de tous les instants qui explique évidemment le début de saison en fanfare de ses joueurs. Le technicien n’hésite d’ailleurs pas longtemps, lorsqu’on lui demande quelle note il donne à ces dix premières journées de championnat : « 20. C’est un magnifique début de saison, qui prouve que ce que l’on fait ensemble depuis longtemps paye » détaille Fangueiro. « Si j’ai perdu certains joueurs, la base est restée la même. Et les recrues rentraient parfaitement dans mon idée de jeu. Cela me permet de jouer chaque match pour gagner. Donc je suis obligé de répondre 20. »

À la même question, Carzaniga, lui, ne donne pas la note parfaite, mais presque. « 19. Dans le contenu, c’est sûr que le match à Differdange nous a laissé un goût amer. Mais le principal était de prendre les trois points, et notre bilan est proche de la perfection ». Le technicien, de retour à Hesperange, explique néanmoins chercher à encore améliorer la production collective. « Il y a des points à améliorer. On ne sort pas toujours des prestations pendant 90 minutes, on a souvent des petits trous d’airs. Il faut réussir à remédier à ces petits flottements ». Signe que le travail demeure, encore et toujours, avec une exigence similaire à celle de son homologue. 

Une rencontre capitale, mais pas décisive

Carlos Fangueiro peut se vanter d’avoir mis en place une mécanique particulièrement bien huilée. Travaillant avec le même groupe depuis de nombreuses années, le technicien peut ainsi continuer d’appliquer ses principes, et sa philosophie de jeu. Avec un véritable contrôle sur les recrues, l’entraîneur lusitanien a réussi à faire oublier les départs de joueurs majeurs comme Van Den Kerkhof, Bettaieb ou encore Cools. Magno, Decker et Skenderovic ont très vite trouvé leur place au sein d’un groupe qui, malgré des changements, pratique encore le même football.

Pour Pascal Carzaniga, la situation est forcément différente. Si l’entraîneur connait évidemment la maison, avec notamment une très belle remontée au classement lors de la saison 2020/21, il n’a repris le poste d’entraîneur principal que cet été. Et s’est retrouvé, comme ses prédécesseurs, confronté à la situation toujours complexe d’un effectif particulièrement chargé. Avec l’équivalent de trois onze, le travail, au-delà de l’aspect purement tactique, se doit aussi d’être dans le relationnel. Un complexe boulot d’équilibriste aidé néanmoins par une connaissance de la maison. «  Je connais pas mal le système ici » confirme Carzaniga. « J’ai gardé le même préparateur, avec David Zitelli en plus comme entraîneur adjoint.  Si vous regardez, le groupe, j’ai déjà travaillé avec beaucoup de ces joueurs. C’est compliqué à gérer du moment que vous ne gagnez pas. Mais si les résultats sont là, vos choix sont légitimés. Et je sens vraiment une belle ambiance au sein du groupe. Mais c’est sûr que pour les joueurs qui ne sont pas pris, c’est difficile ». Connaisseur de la maison, l’homme fort ne cache pas néanmoins, avec un trait d’humour, la charge mentale qu’implique de s’occuper d’Hesperange. « Il faut être un peu fou pour prendre le challenge du Swift, mais moi j’aime ça. C’est un taux d’adrénaline encore plus élevé. Mais cela pompe énormément d’énergie. Une année à Hesperange, c’est l’équivalent de trois ans ailleurs. »

Avec les résultats derrière lui, le technicien voit ses choix confortés. Et peut aussi se targuer d’avoir, lui aussi, des joueurs qui soulignent son importance. « Cazza, c’est un meneur d’hommes » confirme Clément Couturier. « Il arrive à amener un super état d’esprit, qui nous donne envie de tout donner sur le terrain ». Un avis partagé par le capitaine Mehdi Terki, sans concession sur la plus value du nouveau coach. « Au niveau de l’entraineur, sans manquer de respect à Parisi, c’est le jour et la nuit compare à la saison passée ». Si cela ne suffisait pas, la révélation de la saison, Rayan Philippe, loue aussi l’apport du technicien dans son explosion : « L’année dernière, avec les changements de coachs, des visions pas toujours très faciles à comprendre, ça n’a pas aidé… Aujourd’hui, les choses sont beaucoup plus structurées et simples. On sait exactement où on va, avec un objectif clair. »

Alors que le choc entre les deux équipes aura lieu ce week-end, on ne pouvait évidemment pas s’empêcher de poser la question aux deux techniciens sur les clés pour le match à venir. « On va jouer une équipe qui a fait un investissement de fou pour être champion. Au niveau individuel, ce sont des joueurs extrêmement costauds, pratiquement tous professionnels. Mais je pense qu’on a un groupe de travail encore plus fort que l’année passée » assène avec confiance Fangueiro, avant de tempérer sur l’importance de ce match. « Le fait de pouvoir prendre cinq points d’avance, c’est motivant. Mais c’est bien trop tôt pour pouvoir parler de finale. On ne peut pas décider d’un champion après la onzième journée ». Si Carzaniga partage cet avis, il ne cache pas néanmoins l’impact psychologique que pourrait avoir la rencontre. « Celui qui l’emportera dimanche aura fait un pas psychologique sur l’adversaire. Cela va être un match tactique. Que cela soit Carlos ou moi, on connait nos systèmes par coeur. Il a un super rodage car cela fait trois ans qu’il travaille avec son groupe. Nous, on a mis en place quelque chose depuis le 15 juin, quittent la route ».

Ce dimanche, sur les coups de 18h, Dudelange et le Swift vont donc croiser le fer pour un match qui permet d’être passionnant. Un combat tactique, qui devrait offrir deux approches de tacticiens sûrs de leurs choix, et bien décidés à en découdre. Ils pourront compter sur leur groupe qui, au vu de leur propos, vouent une confiance aveugle en leurs entraîneurs. Déjà une victoire.

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