Entre João Simões et Differdange, le divorce est consommé

Alors que nous avions annoncé mercredi la résiliation de João Simões avec Differdange, le joueur a justifié son départ en vidéo, jeudi soir. Le FCD03 s’est défendu dans un communiqué.

Un fond en brique, un canapé orange, le regard face caméra : dans une vidéo de quinze minutes, João Simões se livre. Sa blessure, son opération, sa convalescence, son départ, le Portugais de 21 ans dévoile toutes les raisons qui l’ont poussé à résilier, unilatéralement, son contrat avec le FC Differdange. Après un premier exercice prometteur sous les couleurs du FC Differdange (8 buts et 8 passes décisives en 24 matchs), João Simões avait vu sa saison prendre fin prématurément. Touché face à la Jeunesse d’Esch fin avril, le diagnostic du genou droit de João Simões est sans appel : le ligament croisé antérieur, le ligament latéral et le ménisque sont touchés. Fin de saison et pas de finale de Coupe face au Marisca Mersch. Au moment d’évoquer ce rendez-vous manqué, le joueur formé à l’Académica de Coimbra fond en larmes.

Une opération au Portugal qui fait grincer des dents

Désireux de se faire soigner au Portugal par Hélder Pereira, chirurgien ayant opéré de nombreux joueurs professionnels, le club privilégiait des soins au Luxembourg ou à Nancy. João Simões affirme que le Président, Fabrizio Bei, avait certifié que le club lui fournirait toute l’aide nécessaire dans sa convalescence.

Citant par la suite une interview de Fabrizio Bei pour Le Quotidien, dans laquelle le président du FCD03 déclare que « João a trop attendu à mon goût », João Simões se dit surpris. « Je n’ai reçu aucun contact de sa part. Ce n’est pas moi qui prenais trop de temps, mais l’administration du club qui était en charge de l’administratif pour mon opération. Une semaine, c’était le directeur qui était en vacances, l’autre semaine c’était le médecin du club. Par exemple, quand il a fallu sa signature, nous avons dû attendre plusieurs semaines qu’il revienne. À chaque fois que j’essayais de les contacter, souvent, ils ne décrochaient pas, ou prenaient du temps à répondre à mes messages. Quand ils répondaient, c’était toujours de façon froide. »

Le jeune portugais montre ainsi des extraits de conversation avec un membre du club et les dates auxquelles ses messages ont été envoyés. « Une semaine avant l’opération, j’ai contacté le directeur du club pour garantir le montant nécessaire pour réaliser l’opération. Il m’a répondu qu’il devait en parler au président. J’ai été surpris, je ne m’y attendais pas. Le lendemain, j’ai appris que le président avait communiqué que le club n’assumerait que des dépenses au sein du pays. »

« On l’a aidé avec le docteur, on a donné les papiers, on a les preuves », se défend Rémy Manso. « Mais si tu te fais opérer dans un établissement privé, c’est à toi de voir. »

João Simões assure de son côté être dans son droit en ayant voulu se soigner au Portugal. « Je n’exigerais jamais ce montant si je n’avais pas déjà un document qui prouve mon remboursement par la CNS, quelque chose qui était déjà réglé. Donc je n’ai pas compris leur décision à la dernière minute. » Pour le directeur sportif, Rémy Manso, la décision de se soigner au Portugal est celle de son entourage. « Pourquoi fait-il sa récupération au Portugal ? Parce que son beau-frère lui a dit de le faire. Les joueurs pros à Metz, qui sont tout près de chez nous, vous pensez qu’ils vont se soigner au Portugal ou à l’étranger ? Son opération, c’est la CNS qui paie, comme n’importe quel accident du travail. S’il était parti se soigner en Chine ou en Afrique du Sud, ce serait aussi le cas. Il y a des choses qui sont vraies, mais d’autres qui sont truquées. »

Des preuves falsifiées ?

Dans un communiqué, le club dément formellement avoir fait preuve de négligence envers son joueur. « Nous réfutons catégoriquement les allégations selon lesquelles João n’a pas reçu de suivi médical approprié. Non seulement nous avons les preuves de l’intervention de notre médecin traitant, mais nous avons également entrepris toutes les démarches administratives nécessaires pour que João soit pris en charge et remboursé par la CNS malgré qu’il décide de son propre choix de se faire opérer au Portugal. De plus, après sa blessure, nous avions proposé que João soit opéré au Luxembourg ou dans une clinique réputée à Nancy. Il a choisi de son propre chef de se rendre au Portugal pour cette intervention, un choix que nous avons respecté et soutenu et mis en œuvre toute relation entre la CNS pour un traitement rapide du dossier. »

Une question d’entourage ?

Le FC Differdange accuse le joueur, dans son communiqué, d’avoir tout simplement falsifié les preuves de ce qu’il avance et parle de « messages truqués. » « Certains des messages échangés qu’il présente sont, à notre grande consternation, falsifiés. Nous possédons les preuves de ces manipulations, ce qui démontre le niveau de malveillance et de malhonnêteté derrière cette démarche. » Le club considère que l’entourage de joueur est à l’origine de cette affaire. « Nous étions déjà informés que João était malheureusement entouré de personnes malhonnêtes, dénuées de toute base footballistique, managériale et surtout humaine. Ces individus semblent avoir privilégié leurs intérêts personnels au détriment de ceux du joueur et du club. Nous ne sommes pas surpris de voir ce genre de comportements, mais nous sommes choqués que João ait pu être manipulé à ce point. »

Salaire, logement et rééducation

Dans sa vidéo, João Simões accuse le club d’avoir cessé de lui verser son salaire après sa blessure. « Quand je les contactais, ils n’avaient pas de réponse concrète et je continuais sans être rémunéré. » On peut également lire à l’écran : « Depuis sa blessure, João Simões n’a reçu aucun montant monétaire de la part du club, si ce n’est 225concernant la victoire finale en Coupe. » Une nouvelle fois, le club se défend. « Contrairement aux allégations, le club a toujours respecté ses engagements contractuels envers João. Aucun manquement au contrat a eu lieu. Tous les alinéas de notre contrat on bien étés signés par les deux parties et toutes les clauses ont été scrupuleusement respectées. » Contacté, Rémy Manso, le Directeur Sportif, va plus loin. « C’est un des joueurs les plus chers de l’histoire du club. Le club a dépensé 20 000 € en droits de formation. Il y a une clause dans son contrat qui précise qu’après une certaine période de blessure, le joueur ne perçoit plus de salaire. Comment le club pourrait-il continuer à payer un joueur qui est à l’autre bout du monde pendant des mois ? La saison dernière, on a eu des blessés, et il n’y a jamais eu aucun problème de salaire, parce qu’ils sont restés ici. »

Bénéficiant d’un logement au Luxembourg payé par le club, João Simões affirme avoir accédé à la demande du club, qui lui demandait de le libérer pour un coéquipier. « J’ai collaboré avec eux, en disant qu’il n’y avait aucun problème, et il a été décidé qu’un membre de ma famille irait sur place pour récupérer certaines affaires. Quand il est arrivé, il a retrouvé la porte de la chambre enfoncée. De cette façon, ils ont envahi ma vie privée. C’est là que j’ai vu que les choses prenaient vraiment le mauvais chemin. » « En confrontant les membres de la direction, ces derniers plaisantent, en disant que c’était sans faire exprès », peut-on lire sur la vidéo.

Concernant ces accusations, photo à l’appui, le club précise que « Bien que non mentionné dans le contrat, João a bénéficié d’un logement offert par le club pendant son séjour au Luxembourg. Ainsi que la possibilité de se nourrir chaque jour gratuitement au sein des restaurants d’un partenaire restaurateur.  Ceci témoigne de notre bonne foi et de notre volonté d’aller au-delà de nos obligations contractuelles pour le bien-être de nos joueurs. » « Le deal, c’est qu’il habitait chez sa famille, et ensuite on lui a trouvé une chambre, pour laquelle on n’avait pas de contrat. On ne lui a jamais demandé d’argent pour ça », complète Rémy Manso.

Absent à la reprise

Opéré avec succès, João Simões affirme ne pas avoir été contacté après son opération. « Ce qui m’a encore plus blessé, c’est le fait qu’après l’opération, je n’ai pas reçu un seul appel, un simple message de la part d’un membre de la structure en me demandant si l’opération s’était bien déroulée. Quelques semaines plus tard, je les ai contactés pour les interroger sur mon salaire impayé, et ils se sont rappelés que j’avais déjà été opéré. » Le joueur écrit également à travers sa vidéo que le club lui a reproché son absence à la présentation officielle de l’équipe pour la nouvelle saison. « Sans domicile, sans plan de récupération de la part du club, sans salaire, comment est-ce que je peux survivre, avec la kinésithérapie et les consultations médicales à payer, dans l’un des pays les plus chers du monde ? Je pense que ça ne fait aucun sens et la meilleure décision était de rester proche de ma famille, dans ma ville au Portugal, même si ce ne sont pas les meilleures conditions pour ma récupération. »

Le club affirme avoir « toujours traité ses joueurs, dirigeants et tous ceux qui gravitent autour du club avec respect, dignité et intégrité. Notre engagement envers ces valeurs est indéfectible et est au cœur de notre institution. »

« Son agent voulait le placer aux Pays-Bas gratuitement, pour prendre sa commission de 10 000 euros. »

RÉMY MANSO

Le mercato d’été clôturé, João Simões a donc décidé, cette semaine, de résilier unilatéralement son contrat. « Le joueur et son agent ont essayé de négocier une sortie réaliste et amicale avec le club, notamment un montant fixe avec un pourcentage sur une future vente, ce qui assurait au club une entrée financière conséquente. Après plusieurs semaines de négociation, dont certaines sans réponse de la part de la direction, le club a communiqué à l’agent du joueur qu’il n’avait aucune intention d’arriver à un accord amical. Le joueur n’a donc plus le choix que de résilier légalement son contrat de façon unilatérale », peut-on lire dans la vidéo. « Je l’ai eu en appel vidéo avec son agent. Je leur ai dit de me faire confiance, qu’il pouvait revenir en février ou en mars, finir la saison et trouver une solution en prêt. Je ne peux pas dire au président, qui a dépenser plus de 20 000 euros pour le joueur, de le laisser partir gratuit. Le problème, c’est qu’il a joué une vingtaine de matchs dans une ligue principale et qu’il se fait tourner la tête. Son agent voulait le placer aux Pays-Bas gratuitement, pour prendre sa commission de 10 000 euros, on sait comment ça fonctionne, le business des agents. Mais quel club va mettre un euro pour un joueur dans sa situation ? C’est dommage, j’ai eu une super impression du gamin, mais il se laisse influencer et il ne comprend pas qu’aucun club ne va vouloir d’un gars qui agit comme ça », regrette Rémy Manso.

Le FC Differdange, qui appelle dans son communiqué les autres clubs du Luxembourg à « créer un réseau de communication pour partager et rapporter de telles situations, afin que nous puissions juridiquement nous protéger de ces agissements. »

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